25/02/2010

Bisbilles › LES QUERELLES D'ÉCOLE débordent dans le journal

L'école à la Une du journal Sud-Ouest|Jean-Paul Epinette

L'école élémentaire de Villeréal à la "UNE", ce matin, de Sud-Ouest : on aurait pu applaudir si l'actualité avait touché un projet pédagogique.

Hélas, ce sont des querelles entre parents et enseignants qui ont fait abcès au point de crever sur la scène publique...

— Éditorial —



Des désaccords entre parents et enseignants, ce n'est pas nouveau. Les occasions se sont multipliées au fur et à mesure que notre société évoluait, que les parents revendiquaient un droit de regard sur la scolarité de leurs enfants.

C'est pour cette raison qu'il y a 30 ans – ça commence donc à dater ! – l'Éducation nationale a institué les "Conseils d'école", structures représentatives des acteurs de l'éducation : enseignants, municipalité et représentants élus des parents d'élèves.

S'ils n'ont pas de pouvoir réel, ces conseils d'école n'en constituent pas moins de véritables espaces de parole et de concertation où peut se forger un accord entre les personnes. Or, très souvent, ce dialogue n'a pas été voulu.

Beaucoup d'enseignants se sont braqués, campant sur leur fort Chabrol : "Pas de parents à l'école", au prétexte que l'école devait être "sanctuarisée", préservée de toute influence extérieure.

La rentrée 2009 : parents et enfants dans l'école - Jean-Paul Epinette

En face, des parents tout aussi nombreux ont voulu s'ériger tout à la fois en donneurs d'ordre du plus pur clientélisme, en justiciers, et même en pédagogues. Très peu en partenaires sincères.

Certains avaient sans doute des comptes à régler avec leur (difficile) scolarité passée. D'autres, du fait de leur "Bac+++", imaginaient qu'ils avaient compétence à dicter leur propre méthode de travail et décrier celle que la maîtresse de leur enfant utilisait. Oubliant qu'elle est une professionnelle hautement qualifiée.

On vit ainsi des mamans se réunir après la classe, équipées d'un livre de lecture des années 50, défaire ce qui avait été fait en classe dans la journée pour ânonner avec leur progéniture : "P et I, pi, P et A, pa... La pipe de papa" !...

Manifestation contre la fermeture d'une classe - Jean-Paul Epinette

Oui, le Clochemerle dont parle Sud-Ouest existe à Villeréal comme il existe ailleurs dans notre pays autour de l'école. Alimenté par le dénigrement systématique, l'égoïsme, la bêtise - voire le calcul partisan, le refus de l'évolution et, dans tous les cas, l'absence de dialogue et d'information.

À tel point que le moindre désaccord tourne systématiquement au conflit. Or, sanctuaire de la citoyenneté, l'école - celle de la République – devrait être un lieu d'ouverture.

Ouverture vers l'autre. Ouverture vers la vie. Dans le cas présent, c'est un peu raté. Et l'on peut regretter l'image qui est renvoyée vers les enfants dont on voudrait, une fois adultes, qu'ils soient capables "d'ouverture d'esprit".

L'article du journal Sud-Ouest - Jean-Paul Epinette

Enfin, dans ce débat, l'école ne peut se dégager de sa propre responsabilité. C'est à elle de prendre l'initiative dans le dialogue. C'est à elle de faire cet effort, quelle que soit la difficulté qui se présente. C'est sa mission. Sinon qui, demain, la remplira ? Les ayatollahs de tout poil ? Les marchands du Temple ?

L'école doit faire son examen de conscience. Comment ne pas voir qu'à Villeréal, en quelques années, elle s'est repliée sur elle-même. Ne communiquant plus avec le village, n'ayant plus d'échanges avec ses habitants. Peu de Villeréalais (et pas tous les parents d'élèves !) sont aujourd'hui capables de désigner par son nom chacun des enseignants de l'école.

D'ailleurs ceux-ci ne veulent plus habiter dans le village, précisément, pour échapper à la pression de la cité (Inspection académique, municipalité, parents, marchands.) Plus aucun enseignant n'est désormais impliqué dans la vie associative de ce qui n'est plus "sa" commune... Ami, entends-tu ? Citoyen où es-tu ?

Sous l'adversité, l'école à Villeréal est devenue autiste, coupée du monde extérieur. Une image confine à la caricature : chaqe jour des visiteurs tournent tout autour de l'école en se demandant comment on fait pour y entrer. Comment ? Par l'escalier de secours ! 


Jean-Paul Épinette

25/02/2010